Autoroute A15, à quelques kilomètres de Paris.
©JEAN-LOUP GAUTREAU/AFP
Environnement

2 minutes pour comprendre les polémiques autour du projet routier "BIP"

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Les projets routiers sont devenus des foyers de vives contestations citoyennes, cristallisant de fortes oppositions sociales, environnementales, ou économiques. Après l’A69, la potentielle reprise des travaux du "BIP", projet routier à l’arrêt depuis 2016, ravive les tensions dans le Val d’Oise. Retour sur ces désaccords pour les comprendre en moins de deux minutes.

Les mouvements de contestation contre le projet d’autoroute A69 ont récemment fait parler d'eux dans la presse. Pour autant, ce n’est pas le seul projet routier à susciter des résistances citoyennes. Le 7 octobre dernier, des riverains du Val d’Oise, réunis au sein du collectif "Vivre sans BIP", ont de nouveau exprimé leur opposition au projet de l'avenue du Parisis, surnommé "BIP." Mais alors, pourquoi ce projet fait-il débat ? Explications.

Un projet qui ne date pas d’hier…

Décidé en 1939, le BIP vise à relier l’A1 et l’A15 par une route de deux fois deux voies. Deux tronçons de cette route de 21 km existent déjà, il reste donc 11 kilomètres à construire. Ces 11 km, s'ils voient le jour, traverseront ou longeront 8 villes du Val d’Oise et entraîneront la destruction d'une centaine d'hectares d'espaces verts.

…. Et qui fait débat depuis longtemps  

Porté par le conseil départemental du Val d'Oise, le projet fait face à une opposition véhémente de la part d'une partie de la population et de plusieurs élus locaux. Depuis 2016, la construction de la route est suspendue en raison d'un recours juridique déposé par le collectif "Vivre sans BIP". Malgré trois décisions favorables rendues par la justice en faveur du collectif, le conseil départemental se pourvoit aujourd’hui en cassation. La décision finale devrait être rendue d'ici la fin de l’année. Si le département obtient gain de cause, les travaux pourraient débuter en 2024.

Désengorgement en question 

Pour les partisans du BIP, la fluidification du trafic est le principal argument en faveur de sa construction. "45 000 véhicules passent par Soisy-sous-Montmorency chaque jour", affirmait Luc Strehainano, vice-président du conseil départemental et maire de la ville sur France Bleu le 6 octobre dernier. Les opposants, eux, soulèvent que plusieurs études, notamment menées par l’ADEME, Agence de l'environnement et de la maîtrise de l’énergie, montrent que la création de nouvelles voies de circulation a tendance à générer une augmentation du trafic et, par conséquent, à accroître les émissions de gaz à effet de serre. Le BIP risque de "créer un trafic supplémentaire et de nouveaux bouchons", nous confie Audrey, habitante du Val d'Oise et membre du collectif "Vivre sans BIP".

Derrière l'argument du désengorgement, les opposants au projet soupçonnent des motivations économiques. "Cette route servirait en grande partie à faire passer des camions", avance Audrey, "elle desservirait les entrepôts de Roissy, mais aussi de Garonor qui est la zone d’entrepôt la plus importante d’Ile-de-France, le port de Genevilliers et un nouveau projet d’entrepôt géant, le green dock. Cela aurait un impact dramatique en termes de santé publique surtout dans une zone de région parisienne déjà danse et ultra polluée".

Ce projet est une catastrophe sanitaire, environnementale et sociale" - Audrey, habitante du Val d'Oise et membre du collectif "Vivre sans BIP"

Un enjeu de santé publique 

La pollution atmosphérique, en particulier près des écoles, préoccupe grandement les opposants au projet. "Quarante établissements scolaires sont situés à proximité du tracé de cette voie rapide, et au total, ce sont 10 000 enfants qui seraient exposés à cette route", rappelle Audrey. Des enfants qui sont "déjà surexposés à la pollution de l'air et à la pollution sonore, notamment en raison de la proximité avec les couloirs aériens de Roissy". Pour le collectif, la construction de cette route serait un "scandale sanitaire" directement porté par le conseil départemental.

Des mesures compensatoires décriées

Trois (autres) départements franciliens (Yvelines, Val-d’Oise, Essonne) figurent aussi parmi les départements les plus urbanisés de France avec des taux d’artificialisation supérieurs à 20 %" - L'Agreste, 2021

La construction du BIP entraînerait la destruction d'espaces naturels et agricoles, dont des milliers d'arbres, des anciens vergers, des vignes ou une partie de la zone humide du Petit Rhône qui serait partiellement transpercée. La Ferme Lemoine se trouvant au pied des quartiers très bétonnés de Sarcelles et Garges-lès-Gonesse et qui fait de la vente directe aux habitants, sera également rasée.

Pour compenser ces pertes, le département prévoit la plantation d'un million d'arbres dans la forêt de Maubuisson. Une broutille pour les opposants au projet. En septembre, 200 scientifiques de L’Atécopol ont rappelé que les services écosystémiques et la capacité à absorber le carbone d'un arbre mature ne peuvent être remplacés par la plantation d'un jeune arbre.

Dans un contexte de réchauffement climatique, il faut, pour les opposants au projet, éviter de "bétonner les derniers espaces verts de la région" qui sont à la fois des puits de carbone et de fraîcheur. Le collectif met également en avant la nécessité sociale de conserver ces espaces de nature. "On ne va pas délocaliser les gens. Comment peut-on compenser le fait de supprimer aux habitants leur dernière poche de verdure pour la bétonner et leur mettre sous le nez une route à 4 voies?"

Des propositions alternatives portées par les citoyens

Pour les membres de "Vivre sans BIP", la réalisation de l’avenue de Parisis serait une "catastrophe sanitaire, environnementale et sociale". Si leur priorité est de préserver les espaces naturels existants, ils envisagent également des solutions pour l'avenir. Parce que "c’est quelque chose qui doit se faire collectivement avec les habitants", ils n'ont pas de projet définitif mais aspirent à valoriser les espaces naturels du territoire et investir dans les transports en commun et les mobilités douces. "Transformer les mobilités, c’est la trajectoire que doit prendre la France pour suivre les directives scientifiques", avance Audrey avant de conclure : "aujourd’hui c’est un non-sens de continuer à fabriquer des routes pour favoriser le tout-voiture, il faut investir dans les mobilités décarbonnées".

Le tracé du BIP et l’emplacement des écoles qui se trouvent à proximité.
©Collectif Vivre sans Bip

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