En Guadeloupe, 600 sites archéologiques se trouvent en position littorale.
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Environnement

Comment protéger les sites archéologiques de Guadeloupe ?

Les archéologues qui travaillent aux Antilles s’inquiètent du recul du trait de côte, qui met en péril divers sites historiques. En Guadeloupe, la situation est particulièrement critique et les chercheurs doivent trouver des solutions pour continuer leurs explorations. 

"Les effets du changement climatique menacent les populations, la biodiversité, les activités économiques, mais aussi le patrimoine archéologique et historique", alerte auprès d’ID Marie-Yvane Daire, directrice de recherche au CNRS, archéologue et co-responsable du projet Archéologie littorale outre-Atlantique (Aloa). Ce projet, fondé en collaboration avec le chercheur espagnol Elias Lopez Romero, vise à surveiller et anticiper les effets destructeurs des changements climatiques sur le patrimoine côtier des Antilles

Du 9 au 12 avril, un colloque s’est tenu au Moule, commune située au nord-est de la Guadeloupe, pour que les professionnels travaillant sur les conséquences de l’érosion côtière sur les sites archéologiques des Antilles françaises échangent sur leurs observations. Et sur l'île guadeloupéenne, la situation est critique. "À l’heure actuelle, il y a 600 sites en position littorale, dont 160 menacés de disparition, voire déjà en train de disparaître", relate Marie-Yvane Daire. Pour faire face à ce problème, les chercheurs doivent étudier les sites, avant qu’ils ne disparaissent. C’est ce qu’on appelle l’archéologie préventive.

"La loi sur l'archéologie préventive ne s'applique que quand il y a un aménageur et donc quelqu'un qui paye. Alors sur le littoral, on est bloqué, car on n’a pas de ressources financières"

"Evidemment, on ne peut pas tout fouiller, alors on se base sur des critères sélectifs", raconte Marie-Yvane Daire. Les archéologues choisissent les sites les plus importants, les plus menacés, ou ceux qui vont documenter une période ou une culture mal connue. En France, l’archéologie préventive est encadrée par le ministère de la culture et s’est principalement développée, ces dernières années, dans le cadre de constructions comme des chemins de fer ou des autoroutes. Les aménageurs détruisent des sites, ils ont donc l’obligation de financer une partie archéologique, avant les travaux. "La loi sur l'archéologie préventive ne s'applique que quand il y a un aménageur et donc quelqu'un qui paye. Alors sur le littoral, on est bloqué, car on n’a pas de ressources financières", explique la directrice de recherche au CNRS.

Un outil pour associer grand public et chercheurs

Au-delà de l’archéologie préventive, les solutions pour faire face à l’érosion côtière ne sont pas nombreuses. "Si ce n’est augmenter le nombre d'archéologues ou faire participer le public il n’y a pas d'autres solutions", témoigne la chercheuse au CNRS. C’est pour cette raison que le projet Aloa a lancé un outil participatif, afin d'aider les chercheurs dans leur travail d’inventaire. "Il n’y a pas suffisamment d’archéologues pour surveiller tous les sites. Alors on a créé une base de données en ligne que les gens peuvent remplir via leurs smartphones", éclaire la co-responsable du projet. Pour le moment, cet outil n'est disponible qu'en Guadeloupe.

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Ces solutions permettent de préserver les données qui risquent de disparaître, mais pour limiter l’érosion côtière elle-même, il est plus difficile de trouver des solutions. La chercheuse précise tout de même qu’il existe parfois des mesures physiques mais qu’elles ne sont pas toujours satisfaisantes et surtout, qu’il n’est pas possible de mettre tous les littoraux et sites archéologiques "sous cloche". Marie-Yvane Daire est actuellement en Guadeloupe pour ses travaux. Ici, elle a pu explorer un site archéologique amérindien, "très ancien et très important". Depuis 1950, le trait de côte y a reculé de 90 mètres, emportant squelettes et morceaux de poterie à l’eau. "Et chaque jour, ce site continue de se faire grignoter par la mer", déplore la chercheuse.