Issu d'un exercice inédit de démocratie participative, le projet de loi climat arrive lundi devant l'Assemblée nationale: son histoire en cinq temps forts.
- Avril 2019: "mission" pour 150 citoyens
A la sortie du grand débat national né de la crise des "gilets jaunes", Emmanuel Macron annonce une "mission" pour 150 citoyens tirés au sort: "redessiner toutes les mesures concrètes d'aide aux citoyens sur la transition climatique".
Il s'agit d'éviter de rallumer l'étincelle de la colère des "gilets jaunes" qu'avait constitué l'augmentation annoncée du prix des carburants, par application de la taxe carbone. "Ce qui sortira de cette Convention, je m'y engage, sera soumis sans filtre, soit au vote du Parlement soit à référendum, soit application réglementaire directe", promet le chef de l'Etat.
- Octobre 2019: travaux lancés
"Rien n'est interdit", lance le Premier ministre d'alors, Edouard Philippe, au coup d'envoi des travaux de la Convention citoyenne. Les débats seront pilotés par un comité de gouvernance co-présidé par le directeur général de la fondation Terra Nova, Thierry Pech, et Laurence Tubiana, ex-négociatrice pour la France lors de la COP21.
Les citoyens doivent se réunir pour six weekends de travaux d'ici fin janvier 2020, pour proposer au gouvernement des mesures afin de "réduire les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 40% d'ici à 2030 par rapport à 1990", le tout dans un esprit de "justice sociale". Cinq grandes thématiques sont au menu: se déplacer, consommer, se nourrir, se loger, produire et travailler.
- Juin 2020: 149 propositions, 3 jokers
A l'issue de travaux prolongés par la crise du Covid-19, les citoyens rendent leur copie sur la rénovation thermique globale et obligatoire des bâtiments, la réduction de la place de la voiture individuelle, la taxation de l'alimentation ultra-transformée ou encore l'interdiction des semences OGM.
Emmanuel Macron retient 146 de leurs 149 propositions, brandissant trois jokers: la limitation de la vitesse à 110 km/h sur les autoroutes, l'instauration d'une taxe de 4% sur les dividendes, et la réécriture du préambule de la Constitution qui placerait l'environnement au-dessus des autres valeurs fondamentales de la République.
Le président opte pour intégrer à l'article 1er de la Constitution la défense du climat et la préservation de l'environnement, et annonce pour cela en décembre l'organisation d'un futur référendum.
- Février 2021: un projet de loi étrillé
Au terme d'un processus long et parfois douloureux, le projet de loi "climat et résilience" et ses 69 articles sont présentés en Conseil des ministres. Le texte fait "basculer la France dans l'ère écologique", selon la ministre Barbara Pompili.
Mais les membres de la Convention jugent très sévèrement le gouvernement fin février, avec des notes sous la moyenne sur la traduction de la plupart de leurs propositions. Les ONG environnementales et la gauche sont également critiques. La ministre de la Transition écologique assure que "l'esprit" de la Convention a été respecté et qu'il n'y a "aucune baisse d'ambition", malgré la crise.
Mars 2021: pour "une vraie loi climat"
"Pour une vraie loi climat Stop au blabla": quelque 110.000 personnes au total, selon les organisateurs, manifestent dans 150 villes à l'appel d'ONG, syndicats, partis et de membres de la Convention Citoyenne pour le climat, à la veille de l'examen du texte par l'Assemblée nationale. Pour Nadine Breneur, membre de la CCC défilant à Strasbourg, les propositions "ont été modifiées, diluées, voire mises de côté, je me sens trahie".
Mme Pompili assure continuer à "(s)e battre pour avoir les mesures les plus ambitieuses possible", espérant que les parlementaires pourraient encore voter certaines "avancées". Les organisateurs appellent déjà à défiler le 9 mai "si la loi est votée en l'état".