Col de l'Arzelier: en quête de nouvelles pistes, après l'arrêt des remontées mécaniques

Le grand hôtel est à vendre et les remontées mécaniques sont à l'arrêt, mais au pied des pistes, un atelier de vélo électrique se prépare à ouvrir: le col de l'Arzelier, dans le Vercors, se cherche un second souffle.

Au petit matin, les Deux Soeurs, pitons rocheux qui surplombent le site, se dorent sous les rayons du soleil naissant. Les premières neiges de la saison arrivées la veille ne feront pas redémarrer le télésiège, immobile depuis fin 2018.

Taz et Obi, les deux chiens de Myriam Estades, s'en donnent à coeur joie dans la neige fraîche.

Installée depuis environ un an là où, petite, elle a appris à skier, cette quinquagénaire est heureuse de vivre dans ce cadre "magnifique", mais souhaite ardemment "que la station, que l'environnement revivent, peu importe si c'est du ski ou autre, parce qu'en fait, c'est devenu une cité dortoir".

A 1.154 mètres d'altitude, le col de l'Arzelier était une station familiale créée au mitan des années 1960, avec un télésiège et quelques téléskis prisés des gens du coin et des enfants qui venaient se familiariser avec la glisse.

Le site figure parmi les 186 domaines skiables fermés en France depuis les années 70, selon le décompte du géographe Pierre-Alexandre Metral, doctorant à l'université de Grenoble qui étudie les stratégies de reconversion.

Le déclin du col de l'Arzelier a été causé par plusieurs facteurs, explique Jacques Postoly, ancien président du ski-club local et maire au moment de la décision de fermeture: les saisons sans neige -"on va dire aujourd'hui le réchauffement climatique"-, un développement compliqué par des terrains privés, des problèmes de disponibilité de logements saisonniers...

Et la commune de Château-Bernard, 300 habitants, n'a pas pu assumer l'entretien, coûteux, du matériel vieillissant. "Pas facile du tout, quand on est amoureux de son territoire et skieur comme je l'étais", soupire M. Postoly.

La nouvelle équipe municipale, arrivée en 2020, après la fermeture, doit relever le défi.

"C'est un petit peu délicat", constate la première adjointe municipale, Anne Deprez. Entre nécessité économique et conditions climatiques, "on a décidé de partir sur une autre orientation, beaucoup plus portée sur le côté naturel et sauvage de la montagne", explique-t-elle.

- Expérience "sans voiture" -

Raquettes et ski de randonnée remplacent la glisse. En haut du télésiège, le refuge de la Soldanelle promet "panorama exceptionnel", séjour en yourte et expérience "sans voiture", pour les amateurs de randonnées sportives, de descentes VTT ou de découverte de la montage en famille. Le refuge a maintenu sa fréquentation, selon l'élue.

L'ancienne épicerie a été rebaptisée "Altebike". Pierre Menade et son collègue Thomas Honoré se préparent à y proposer au printemps location et réparation pour vélos électriques.

"On a dit à la mairie qu'on voulait redynamiser au niveau local le patrimoine bâti du coin, qu'on puisse développer toutes ces choses-là et, du coup on a plutôt été bien accueilli", explique Pierre Menade, 40 ans.

Un peu plus loin, une fabrique de pâtes doit ouvrir dans un ancien local de location de matériel de ski.

Le changement est parfois difficile, surtout pour ceux qui ont connu les temps fastes du ski de piste.

- Refuge climatique -

L'imposant hôtel des Deux Soeurs, à vendre, fait face aux pistes. Construit par l'un des fondateurs de la station, il a fermé dans les années 2000.

Le bâtiment a été choisi l'an dernier pour un projet d'architecture développé par des étudiants de la région Auvergne-Rhône-Alpes pour un concours européen, le Solar Decathlon.

Ils ont imaginé une réhabilitation entre activité économique et habitat permanent, inspirés par la "résidentialisation en cours", raconte l'architecte Christophe de Tricaud, qui a aidé à superviser le projet.

Selon lui, "environ 30% des logements touristiques sont habités de manière permanente au col".

"On pense que cette résidentialisation pourrait tout à fait se poursuivre et s'intensifier au regard notamment du changement climatique et de l'habitabilité des métropoles, celle de Grenoble" en particulier, poursuit-il. Pour lui, la moyenne montagne pourrait "tout à fait devenir un refuge climatique", dans le futur.