"Déserts", terres de vie et terres des hommes, au Muséum d'histoire naturelle

Kalahari, Gobi, Mojave, Arctique... dans le vent chaud ou le froid glacial des déserts, le Muséum d'histoire naturelle part à la découverte de la vie et des cultures qui se sont adaptées à ces mondes extrêmes.

Qu'est-ce qu'un désert ? Si l'image d'un dromadaire sur une dune vient immédiatement à l'esprit, la réponse n'est pas si évidente. Un désert n'est pas forcément immense, ni vide. Il peut même être tempéré.

"Nous nous sommes rendus compte qu'en fonction du scientifique qu'on interrogeait, de sa discipline, nous n'avions pas du tout la même définition", explique Anne-Camille Bouillié, conceptrice de l'exposition, qui s'ouvre mercredi à Paris.

Le terme de la "difficulté à vivre" dans cet environnement est d'ailleurs souvent "récusé" par les populations locales, note Vincent Battesti, anthropologue spécialiste des oasis.

Entre l'infinité de paysages offerts par la banquise, le bush australien ou les dunes du Sahara, une caractéristique commune: la rareté de l'eau douce sous forme liquide.

Un seul critère qui, en comptant les zones semi-arides, recouvre un tiers des terres émergées du globe. Sur tous les continents et même tout près de chez nous, par exemple les Bardenas Reales, véritable décor de western au Nord de l'Espagne.

L'exposition, qui se tiendra jusqu'au 30 novembre, explore cette variété, à travers par exemple 45 échantillons de sable dont la palette s'étale du blanc au rouge en passant par le gris. Et explique "le rôle joué par les éléments: l'eau, le vent, les chocs thermiques" dans la formation des déserts et le façonnage de leurs reliefs, détaille Mme Bouillié.

Avant de "démonter l'idée selon laquelle les milieux désertiques sont dépourvus de vie", poursuit-elle.

- Malle du bédouin -

Faune et flore ont développé des trésors d'adaptation pour recueillir l'eau, résister aux températures extrêmes et se protéger des prédateurs dans ces environnements ouverts: plantes sans feuille mais couvertes d'épines ou de duvet, mammifères aux grandes oreilles pour mieux dissiper la chaleur, camouflage....

Des stratégies morphologiques ou comportementales souvent similaires dans des lieux et chez des espèces pourtant très éloignés, mais soumis aux mêmes contraintes. Ce que les scientifiques appellent la "convergence évolutive".

Comme les réserves constituées dans la bosse du dromadaire et le tronc des baobabs. Ou l'étonnante "reviviscence", qui permet aux graines de la "plante de la résurrection" en Amérique du Nord ou aux embryons de triops (un petit crustacé) en Australie de rester en dormance pendant des années avant de se développer à la moindre pluie.

Le désert est aussi terre des hommes. Dans des vidéos, Touaregs, Mongols, Inuits témoignent de leur vie dans ces mondes extrêmes où les humains ont "développé deux grandes stratégies", raconte Mme Bouillié.

"La mobilité, se déplacer pour aller chercher des ressources", illustrée à travers une malle du bédouin, le montage d'habitations mobiles ou les méthodes pour se repérer dans ces "paysages qui nous paraissent très monotones", dit-elle.

Et la transformation du milieu avec l'exemple de l'oasis. Une "bulle" construite autour du palmier dattier, un arbre "qui n'existe plus à l'état sauvage" à l'ombre duquel "on peut cultiver des fruitiers, des plantes maraîchères, potagères qui n'ont rien à voir avec le désert", explique M. Battesti.

Une dernière partie propose aux visiteurs de se mettre dans les pas des scientifiques qui ont fait du désert leur terrain de recherche privilégié: géologues, biologistes, anthropologues y racontent leurs liens avec ces environnements si particuliers. A commencer par le plus célèbre d'entre eux, Théodore Monod, dont les précieux carnets ont pour l'occasion été sortis des collections du Muséum.