JO-2030: un ancien fort de Briançon pressenti pour abriter les athlètes

Un fort désaffecté pour abriter un millier d'athlètes: les organisateurs des JO-2030 ont dévoilé mercredi un vaste projet de village olympique à Briançon, un chantier pas encore chiffré mais qui fait déjà grincer des dents les défenseurs de l'environnement.

Dès la première visite, "je m'y suis projeté", a déclaré le président du comité d'organisation des Jeux, Edgar Grospiron lors d'une présentation des grandes lignes du chantier.

"Les conditions offertes par Briançon sont propices à la performance. En tant qu'athlète, c'est quand même ce que je recherche", a ajouté le champion olympique de ski de bosses, se disant "enthousiasmé" par ce projet, l'un des plus importants en vue des Jeux d'hiver dans les Alpes françaises.

Le village olympique, qui doit être bâti à 1.400 mètres d'altitude dans un austère fort Vauban du XVIIIe siècle surplombant la vieille ville, devrait abriter 940 athlètes participant aux épreuves de ski acrobatique et de snowboard prévues respectivement dans les stations de Serre-Chevalier et de Montgenèvre, à environ une quinzaine de km chacune.

Il sera dans un deuxième temps transformé en 150 à 200 logements pérennes, dont une partie sera réservée à l'accession à la propriété de ménages modestes et en un foyer pour travailleurs saisonniers, a indiqué le maire de Briançon, Arnaud Murgia (divers droite). Un projet de téléphérique le reliant à la ville demeure pour l'heure "optionnel", selon lui.

Classé monument historique et inscrit sur la Liste du patrimoine mondial de l'Unesco, le site, desservi par une petite route en mauvais état, était jusqu'ici propriété de l'armée et inoccupé depuis des décennies.

Le choix du fort permet de "répondre à la crise du logement" que traverse le territoire sans artificialiser de nouveaux espaces. De nombreux habitants peinent à se loger en raison de l'envolée des prix dans une vallée où l'habitat permanent est devenu minoritaire face aux résidences secondaires.

Aucune autre solution ne se profile pour ce fort "en danger" et dont l'entretien coûte cher, a insisté le maire: "Nous ne voulons tout simplement pas (le) regarder s'effondrer pierre après pierre dans les années à venir".

- "Deux camps" -

Les porteurs du projet ne se sont en revanche pas prononcés sur le coût du chantier, estimant la question "prématurée" dans l'attente de nouvelles consultations sur ce "projet complexe".

Dans un contexte budgétaire contraint, ce qui importe c'est "que ça soit bien géré, qu'on ne tombe pas dans l'excès et que derrière la dette soit colossale", a réagi Jean-Marie Rey, maire de la commune voisine de Monêtier-les-Bains. "Le fait qu'on ait eu une réussite sur Paris-2024, ça nous donne quand même des bases de confiance..."

Mais d'autres élus locaux dénoncent un manque de transparence et de la précipitation dans le projet de JO, lancé en un temps record par les régions Auvergne Rhône-Alpes et Provence-Alpes Côte d'Azur.

"L'urgence qu'il y a autour de cette candidature biaise tout. Comment on peut s'engager dans des projets aussi impactants sans concertation ?", s'agace Estelle Arnaud, maire sans étiquette du petit village de Puy-Saint-André, qui accueille une partie des pistes de ski de Serre-Chevalier. Pour elle, le dossier "a clivé le territoire en deux clans".

"C'est décalé avec les préoccupations du moment: la sobriété, la transition écologique...", dit-elle à l'AFP. "Il y a des moyens énormes, d'un coup, qui arrivent sur les Jeux olympiques et une énergie incroyable, et tant mieux. Mais pourquoi on ne la mobilise pas sur des sujets qui, à plus ou moins moyen terme, ou court terme peut-être, vont nous impacter plus lourdement ?", s'interroge-t-elle en citant des éboulements récents qui ont affecté sa commune.

Pour Stéphane Faure-Brac, militant et membre de l'association "Comité d'alerte sur les JOP-2030", le projet du Fort des Têtes, situé trop loin des pistes de ski, "a tout faux (...) Les accès sont inexistants. Il n'y a pas l'eau, pas l'électricité. On est excentré, on est loin de tout".

"La chose la plus simple, ça aurait été de le faire en Savoie, où ils ont déjà tout, alors que nous, on est une verrue là-dessus", conclut-il.