Portés par la promesse d'une vie plus agréable comme ce trentenaire croisé au bureau de vote, ou hostiles comme ce retraité pour qui cela va "gêner" les riverains, les Parisiens sont invités à se prononcer dimanche "pour ou contre végétaliser et rendre piétonnes 500 nouvelles rues dans Paris".
Sous la verrière au style Baltard de la mairie du XVIIIe arrondissement, avec 18 bureaux de vote sur les 218 ouverts de la capitale aux plus de 16 ans, retraités, actifs mais aussi religieuses ou familles et leurs enfants en draisienne défilent dès l'ouverture à 9H00.
Des bulletins oui et non sont à disposition, et une seule question pour cet arrondissement: voulez-vous faire de Paris une "ville-jardin"?
Si le "oui" l'emporte, la municipalité de la capitale la plus dense d'Europe promet de "massifier" la piétonnisation entreprise depuis le début du second mandat de la maire socialiste Anne Hidalgo en 2020, qui a déjà transformé 300 rues.
Voter pour Marc Remaggi, enseignant de 37 ans, c'est "améliorer le cadre de vie et rendre Paris plus agréable. C'est essentiel de préparer la ville au climat de demain, il s'agit d'enjeux vitaux".
Sarah, 37 ans et qui travaille dans un atelier de poterie dans le quartier, abonde. "On habite juste à côté d'une rue aux écoles" où les riverains se sont "réapproprié l'espace public" avec une table, un lieu "où on descend prendre le goûter" avec les enfants. "Les Parisiens n'ont pas de jardin", fait-elle remarquer pour illustrer le luxe de "pouvoir rester dehors".
A quelques pas, tulipes jaunes et pruniers en fleurs colorent la ruelle Hermel déjà piétonnisée. Comme dans les autres rues végétales où priorité a été donnée aux piétons et aux mobilités douces, l'asphalte laisse la place à la plantation d'arbres, de stries enherbées, ou de bandes de terre le long des façades.
- Réduction du stationnement -
L'enjeu de la votation de dimanche pour Paris, et 9.900 habitants au km2, est l'aménagement de 500 nouvelles rues, ce qui correspond à cinq à huit rues végétalisées et piétonnisées nouvelles par quartier, en fonction de leur taille.
Les voies éligibles ne sont pas encore déterminées. Elles le seront à partir d'avril, dans chaque arrondissement, pour une mise en oeuvre d'ici à trois ou quatre ans et un coût moyen estimé à 500.000 euros par rue.
Au passage, 10% du stationnement de surface parisien disparaîtrait pour les voitures, soit 10.000 places.
C'est là l'un des arguments avancés par les détracteurs du projet, notamment dans le XVIIIe. Car une diminution est déjà en cours dans certains quartiers comme la butte Montmartre (40.000 habitants), où la création d'une aire piétonne soulève la grogne de riverains.
"Le projet n'est pas adapté à la vie économique de Paris. C'est bien de penser à l'environnement, mais il faut que les gens travaillent", souligne Daniel, un retraité qui préfère ne pas donner son patronyme.
Comme lui, Louis, un ingénieur retraité, évoque la difficulté de stationnement pour les artisans et l'impact pour les commerçants. "Personnellement, on n'est pas embêté, on n'a pas de voiture, mais le serrurier de Courbevoie ne veut plus venir" face aux difficultés pour se garer, prend-il pour exemple, convaincu que le plan de végétalisation "va gêner les gens".
Ce riverain mentionne "des projets pas suffisamment étayés", avec une mairie "plus dans la doctrine que l'efficacité".
Paris a lancé les rues aux écoles lors du déconfinement après la crise du Covid-19. La végétalisation s'est également développée avec la centaine de "cours oasis" destinées à réduire les températures.
D'après l'Apur (l'Atelier parisien d'urbanisme), 31% du territoire de la capitale sont végétalisés, dont 1.840 hectares dans les bois de Boulogne et de Vincennes, 520 hectares de parcs et jardins publics, ainsi que 650 km de voies plantées.
D'autres questions sont posées selon les arrondissements, par exemple dans le sud de Paris: "Pour ou contre l'expérimentation d'une caisse alimentaire solidaire dans le 14e arrondissement ?"
Le vote se termine à 19H00.
Lors des deux précédentes votations, sur le triplement du tarif de stationnement des SUV, en 2024, et l'interdiction des trottinettes électriques en libre-service, un an plus tôt, moins de 8% des électeurs s'étaient déplacés.