La Climate House regroupe 80 entrepreneurs à parité égale et représentatifs.
©DR/Climate House/LinkedIn
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Climate House : un nouveau lieu qui rassemble les acteurs de la transition écologique

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En plein cœur de Paris, une maison baptisée "Climate House" rassemble entrepreneurs, investisseurs, associations, activistes, chercheurs, scientifiques, étudiants... Tous liés par leur envie d'accélérer leur impact et de s'inspirer mutuellement. Comment s'est-t-elle créée ? Quel est son fonctionnement ? D'autres maisons de ce type existeront-elles bientôt en France ? On fait le point.

Qu'il s'agisse d'occuper un bureau, fixe ou nomade, seul ou en équipe, d'organiser ou d'assister à des conférences, ateliers, formations... D'accéder à des programmes personnalisés ou tout simplement de créer du lien social... La Climate House propose depuis octobre 2024 un environnement propice à l'innovation et à la coopération au 39, rue du Caire à Paris, dans le 2e arrondissement. 

ID s'est intéressé à ce nouveau lieu dédié à la transition écologique et s'est entretenu avec Henri-François Martin, co-directeur général de la Climate House. Maika Nuti est l'autre co-directrice générale de ce projet.

Pouvez-vous me parler un peu de vous et de ce qui vous a mené à devenir co-directeur de la Climate House ?

Les cofondateurs de ce projet sont venus me chercher pour construire la structure. J'ai fait la majorité de ma carrière dans la tech en commençant par monter ma propre entreprise, que j'ai revendue. J'ai ensuite passé quatre années chez VeePee en tant que directeur de l'innovation et j'ai contribué à l'ouverture de Station F. J'ai enfin rejoint une autre licorne française, PayFit France, en tant que Chief of Staff. C'est là que j'ai connu les belles heures de l'hypercroissance avec tout ce que cela a de bien et d'injonctions contradictoires, notamment sur les sujets environnementaux.

C'est entre autres là que j'ai pu porter les sujets de comptabilité carbone à des niveaux assez poussés. Cela a matérialisé des enjeux de transformation de l'économie que nous allions connaître dans les années à venir. C'est ce qui m'a donné envie de me dédier à l'impact. À partir du moment où Lucie Basch (ndlr : entrepreneuse française à l'origine de Too Good To Go et co-fondatrice et présidente de la Climate House) m'a présenté l'ambition de ce projet, je n'ai pas hésité une seule seconde et j'ai rejoint l'aventure. 

Il y avait vraiment cette conviction que les démarches collectives avaient besoin d'être incarnées".

Comment est né ce projet ?

©DR/Climate House LinkedIn

Le point de départ venait de Lucie Basch, Clément Alteresco, Claire Bretton et Jack Habra. Ils ont catalysé les 80 cofondateurs. Ils souhaitaient mettre à disposition leur réseau, leur savoir-faire et un peu de leur financement au service de la transformation de l'économie, qui est vraiment ce que porte le projet de la Climate House. L'ambition était de regrouper l'ensemble des acteurs de l'écosystème impact. L'enjeu était de matérialiser cela avec un lieu pour avoir un point d'ancrage car historiquement, chacun était un peu dans son couloir. Il y avait vraiment cette conviction que les démarches collectives avaient besoin d'être incarnées. 

Le projet a été officialisé en juin 2024, les travaux dans le bâtiment ont commencé en août et les portes de la Climate House ont ouvert en octobre dernier. 

Pourquoi avoir choisi ce lieu en particulier ?

Il y a plusieurs raisons, déjà parce qu'il était disponible ! Ensuite, nous avons eu de la chance car ce lieu a une histoire, c'est l'ancien bâtiment du Numa, le temple de l'entrepreneuriat français. Il y avait aussi une conviction d'avoir un espace central dans Paris avec des dimensions ambitieuses et raisonnables pour un projet qui se lançait. Nous disposons de 2 000 m2 sur six étages. Le fait que ce soit un bâtiment historiquement adressé par Morning (ndlr : espaces de travail et de coworking) nous donnait la perspective de nous mettre un pied à l'étrier sur un de nos métiers, celui du coworking, qui était non-négligeable. 

Comment fonctionne la Climate House ? Comment y entre-t-on ?

Vous pouvez entrer à la Climate House sous différentes formes. Le premier aspect est l'espace de travail. Il y a près de 200 postes fixes. Vous pouvez avoir un poste de résident permanent mais aussi venir travailler dans des formats nomades dans les espaces collectifs, là où il y a de la place et quand il y en a. 

Nous faisons une sélection des personnes pour s'assurer que l'écosystème qui travaille avec nous soit des acteurs de l'impact au sens large. Nous avons aussi bien des indépendants que des scientifiques, des start-ups de l'impact, des cabinets de conseil, des experts pédagogiques, etc. L'enjeu était de se constituer un pool le plus divers possible mais qui ait le point commun d'être un ensemble d'entrepreneurs de l'impact. 

Henri-François Martin, Lucie Basch, Maïka Nuti.
©DR/ Climate House LinkedIn

Notre deuxième verticale d'activité est l'événementiel. Nous proposons pour nos adhérents et colocataires près de 200 conférences par an sur des thématiques concernant l'eau, la biodiversité, l'énergie, le bâtiment durable, la finance responsable et les nouveaux modèles économiques. Une programmation s'organise sur tous ces thèmes. Une partie est adressée par nous, Climate House, l'autre l'est par la communauté. 

Même dans les scénarios les plus optimistes, j'aurais eu du mal à matérialiser ce qu'il se passe aujourd'hui".

Comment tout cela est financé ?

Nos 80 cofondateurs, 40 femmes et 40 hommes, ont tous mis un ticket de 20 000 euros. Je précise que c'était important d'avoir un équilibre sur la parité de ces cofondateurs, qu'ils puissent tous contribuer. Cela nous a permis de financer le point de départ de ce lieu. Les deux tiers de nos revenus reposent sur l'hébergement, donc le coworking. Le dernier tiers est divisé entre l'événementiel et les adhésions mises en place avec les acteurs de l'économie qui rejoignent l'aventure pour pouvoir bénéficier de cet écosystème et pour adresser leur road map de transformation avec les membres de l'écosystème. 

Il s'agit de la troisième activité que nous développons, notre mesure d'impact, pour inciter à faire le pont entre écologie et économies au contact de nos adhérents et de notre communauté. 

Vous sentez aujourd'hui un fort dynamisme autour de la création de cette Climate House ? 

Honnêtement, c'est assez incroyable. Même dans les scénarios les plus optimistes, j'aurais eu du mal à matérialiser ce qu'il se passe aujourd'hui. Je pense que l'écosystème impact avait besoin d'un lieu d'ancrage pour se retrouver et évoquer au détour de la machine à café ou d'une salle de réunion l'ensemble des projets à construire ensemble. Un point assez magique, c'est de se dire qu'au sein de cette communauté, vous avez finalement des entreprises de nature assez diverse avec des compétences différentes, et pourtant, au quotidien, vous avez ce sentiment qu'elles forment une seule et même entreprise. C'est assez bluffant. Nous sommes un open space, les bureaux ne sont pas fermés. 

Certains résidents disent avoir presque peur de se lever de leur bureau tellement en se baladant dans le bâtiment, ils croisent des conversations intéressantes sur lesquelles on les sollicite ou qui leur donne envie de s'arrêter. Pour l'instant, nous avons réussi à matérialiser cette logique de dynamique collective qui peut paraître très théorique de l'extérieur, mais qui au quotidien est extrêmement physique. Ça bouillonne. C'est différent d'une approche avec un cabinet de conseil. Le côté technique, on l'a ici, mais l'enjeu est d'aborder ces sujets sous un angle collectif. C'est le collectif et le systémique. Cette liberté de parole est très importante.

Combien de résidents peuvent être présents en même temps dans ce lieu?

En termes de capacité physique, nous avons un peu plus de 400 personnes qui peuvent venir travailler ici. Au sein de la communauté, si vous cumulez les résidents permanents, ceux qui viennent pour les événements, nos cofondateurs et les adhérents, nous nous rapprochons des 1 000 personnes qui nous ont rejoint depuis un peu plus de sept mois.

Et d'ailleurs, cet espace de 2 000 m2 sur deux étages, comment est-il composé?

©DR/Climate House/ LinkedIn

Vous avez deux espaces dits "communs" avec une double fonction, une d'espace de travail et une événementielle. Également un étage entier dédié aux salles de réunions. Mais en soit, vous avez des salles de réunions à peu près partout dans la bâtiment. Il y en a 14 au total. Il y a 18 phone boxes, des machines et café et des petites cuisines à chaque étage. Il y a également tout en haut une salle de créativité très demandée.

Dans le cadre du partenariat que nous avons avec Morning, à partir du moment où vous êtes adhérents et résidents, vous avez aussi accès aux 24 bâtiments du réseau Morning à Paris. Cela peut être très sympa d'avoir 24 pied-à-terre à Paris en fonction de vos besoins pour pouvoir enchaîner derrière un rendez-vous.

Nous ne souhaitons pas limiter ce projet au cercle parisien, bien au contraire. Le sujet de la transition est très territorial, nous en sommes conscients..."

Comment s'inscrit-on pour vous rejoindre et comment fonctionne la tarification ?

La première étape est d'aller sur le site et de remplir le formulaire en fonction de ses intérêts. La séparation se fait par l'hébergement, par le fait d'organiser un événement ou par le fait d'adhérer pour accéder à la programmation et à la communauté. Sur le volet résidents, nous faisons des dissociations selon la nature de l'entreprise. Nous avons une tarification spécifique pour les associations et les start-ups notamment. Nous proposons aussi des tarifications spécifique sur les événements selon si vous êtes adhérents ou non. C'est moins cher pour les adhérents.

Nous faisons aussi en sorte que les événements que vous organisez chez nous soient ouverts à la communauté. Vous pouvez organiser un événement avec vos fournisseurs, vos clients, etc. et que ce soit réservé à vous. Mais à partir du moment où vous ouvrez cet espace à la communauté, nous le valorisons et nous y ajoutons un discount supplémentaire. 

Un autre point important à aborder ?

Concernant le fait que la Climate House est à Paris, je précise que nous sommes dans une démarche d'expansion. Nous regardons pour ouvrir de nouveaux espaces, déjà à Paris parce que nous refusons du monde aujourd'hui et que c'est dommage. Mais nous avons aussi des pistes pour avoir des extensions de la Climate House sur des thématiques spécifiques à travers de nouveaux espaces. Nous sommes beaucoup sollicités dans d'autres villes, notamment Marseille, Bordeaux, Montpellier...

Nous ne souhaitons pas limiter ce projet au cercle parisien, bien au contraire. Le sujet de la transition est très territorial, nous en sommes conscients et nous espérons officialiser au moins une ouverture nouvelle d'ici la fin de l'année.