"Si la crise immobilière pèse sur le secteur, la structuration du marché et une reprise en fin d’année laissent entrevoir des perspectives de rebond".
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Crise immobilière et turbulences économiques : le crowdfunding a reculé en 2024

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Le 6e baromètre de référence du financement participatif en France vient d'être publié. Pour une deuxième année de suite, il met en avant un recul du crowdfunding après une période de forte croissance, dans un contexte économique complexe.  

Publié par Forvis Mazars et France FinTech, le baromètre du crowdfunding en France en 2024 montre toutefois que le financement participatif a franchi le cap des 10 milliards d’euros cumulés, avec 10,8 milliards d’euros collectés depuis 2015.

En 2024, 1 731 millions d’euros ont été collectés, soit une baisse de 17,1 % par rapport à l’année 2023.
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Malgré cela, il enregistre pour la seconde année consécutive un recul de -17,1 % avec une collecte s’élevant à 1,7 milliard d’euros pour l’année 2024. "Cette évolution s’inscrit dans un contexte marqué par des turbulences macroéconomiques et géopolitiques, ainsi que par une crise immobilière persistante", lit-on.

"Si la crise immobilière pèse sur le secteur, la structuration du marché et une reprise en fin d’année laissent entrevoir des perspectives de rebond", pointent quand même Forvis Mazars et France FinTech. Car le baromètre montre malgré tout des signes de reprise pour le second semestre 2024. "Cette dynamique dépendra toutefois de la confiance des investisseurs et des entreprises, ainsi que des orientations des politiques publiques, dans un contexte où plus de 65 000 entreprises ont fait faillite en 2024 d’après les chiffres publiés par la Banque de France", souligne-t-on.

À noter que le crowdfunding immobilier enregistre un recul encore plus important, de - 25,8 %. Selon le baromètre, il ne représente plus "que" 49,7 % de la collecte globale. 

"Dans un contexte de contraction du marché immobilier, le financement participatif n’échappe pas aux réalités économiques des sous-jacents qu’il finance, est-il souligné. La progression notable des retards constatée en 2023 s’est poursuivie en 2024. Les difficultés de remboursements, déjà en hausse en 2023, se sont accentuées en 2024, avec 15 à 20 % des projets accusant un retard de plus de six mois."

Les chiffres du crowdfunding immobilier.
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Le cas des énergies renouvelables

Concernant le crowdfunding des énergies renouvelables (EnR), celui-ci affiche pour sa part "un léger retrait" de - 4,3 % en 2024. Il représente une collecte annuelle de 352 millions d’euros, représentant 20,3 % de la collecte globale, contre 17, 6 % l'an dernier. Cela renforce "son positionnement de deuxième classe d’actifs du crowdfunding", estiment les auteurs du baromètre.

On apprend que les opérations de collecte portent en premier lieu sur des projets liés à l’énergie solaire, (67 %) qui devancent largement l’éolien (12 %), le biogaz (9 %) et le stockage (4 %). Mais aussi que 218 projets ont été remboursés en 2024 pour un montant de 76,1 millions d’euros. Et que le montant moyen d’une collecte par projet est de 1 135 483 euros avec une durée moyenne de placement de 45,2 mois.

Les chiffres du crowdfunding EnR.
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Le crowdfunding enregistre une nouvelle baisse de la collecte cette année, ce qui n’étonne guère au regard du contexte économique et géopolitique, accentué par un cadre réglementaire nouveau qui a apporté son lot de contraintes et d’exigences (...)." 

 

- Florence de Maupeou - Directrice générale adjointe relations institutionnelles et financement participatif chez France FinTech

Un contexte compliqué

Comment expliquer ce recul pour une deuxième année consécutive ? Les auteurs du baromètre relèvent entre autres l'impact prolongé de la crise immobilière, qui continue de peser sur la collecte en obligations ; la reconfiguration du secteur du prêt et de l’investissement autour de l’agrément de Prestataire de Services de Financement Participatif (PSFP) en application du règlement (UE) 2020/1503 ; l’absence de décollage de l’investissement en capital, "freiné par l’instabilité institutionnelle et les incertitudes autour des dispositifs fiscaux et de soutien à l’innovation, éléments clés de ce segment".

Le baromètre note par ailleurs la similarité des stratégies de collectes par rapport l’année précédente, "avec une approche directe qui reste majoritaire (64 %), tandis que les canaux intermédiés se stabilisent à 36 %, principalement via les CGP (18 %), le réseau bancaire (11 %) et les fonds (7 %)".

Quelle est d'ailleurs l'influence des créateurs de contenu sur les collectes ? Celle-ci demeurerait modérée, selon l’évaluation des plateformes, qui leur attribuent en moyenne une note de 2 sur 5. Leur rôle pédagogique est toutefois souligné.

Sans surprise, 2024 est une année moins flamboyante pour le crowdfunding, qui continue de subir la crise du secteur immobilier. La barre symbolique des 10 milliards d’euros de collecte a été franchie cette année, affirmant le rôle clé que joue le financement participatif dans le paysage financier (...)."

-Bertrand Desportes - Associé chez Forvis Mazars

Des signes positifs pour le don

Les chiffres du financement participatif en prêt ont connu une baisse de -18,8 %. Même son de cloche concernant le crowdfunding en investissement. "Avec 202,5 millions d’euros collectés en capital ou en royalties, contre 267,2 millions en 2023, l’année 2024 n’a pas été l’année attendue pour le crowdfunding en investissement malgré le dynamisme des multiples écosystèmes d’innovation auxquels il est lié".

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Mais le financement participatif en don connaît pour sa part une autre réalité, avec une croissance de + 11,5 % et une collecte de 178,9 millions d’euros. Il s'agit du "seul segment en croissance, bénéficiant d’une dynamique indépendante du marché de l’épargne et qui s’impose comme un levier majeur pour les particuliers et l’économie sociale et solidaire". On apprend notamment que le secteur culturel est l’un des grands bénéficiaires de ce mode de financement, avec 80,2 millions d’euros collectés.

"Les 163 572 projets financés confirment la popularité du crowdfunding chez les Français" soulignent quoi qu'il en soit Forvis Mazars et France FinTech.