Suite à une publication sur le réseau social Linkedin, nous avons voulu en savoir plus sur la position de l'ONG Reclaim Finance à propos du label ISR et de la règlementation.
Depuis l’entrée en vigueur du nouveau cahier des charges du label ISR vous annoncez un tiers de dé labellisation, c’est un chiffre confirmé par le label ISR ? Qu’est-ce qu’il illustre selon vous ?
Il s'agit d'une estimation donnée par Les Echos. Une estimation plus précise n'était pas possible car le secrétariat du label ISR est en cours de renouvellement depuis le 1er janvier, ce qui rend toute vérification auprès d'eux impossible. Le Ministere de l'Economie et des Finances nous a indiqué "un fonctionnement restreint du secrétariat, directement par le comité du label ISR et la DG Trésor, jusqu’à la fin du mois de février." mais il ne me semble pas qu'un nouveau secrétariat ait été nommé depuis.
Vous considérez que la version précédente du label favorisait le greenwashing de certains gérants d’actifs ?
Tout à fait, c'est ce que plusieurs acteurs de la société civile répétaient depuis plusieurs années, en raison de la faiblesse des critères en place. Cette lettre ouverte signée par 60 personnalités et représentants d’organisations dont Reclaim Finance est un exemple d'alerte à ce sujet. La lettre soulignait notamment le besoin d'exclusions pour les secteurs de l’exploration-production d’énergies fossiles - en raison du large consensus scientifique autour de l’impératif de cesser le développement de nouveaux projets d’énergies fossiles pour avoir une chance de limiter le réchauffement planétaire à 1,5°C.
Les récentes dé labellisations montrent que la finance ne se transforme pas d’elle-même, et qu'elle doit être strictement encadrée pour devenir plus durable.
Cette évolution vers plus d’exigence va redonner tout son sens au label au-delà de la règlementation ?
Le nouveau label ISR a en effet gagné en crédibilité et reste l’un des principaux repères aujourd’hui pour l’épargnant en quête de fonds plus durables. Parmi les principales avancées bienvenues à retenir sur le volet climatique se trouve l’exclusion des entreprises qui développent de nouveaux projets de production de pétrole et de gaz (“upstream”). Le gouvernement a donc fait de l’impératif exprimé par le GIEC, l’ONU et l’Agence internationale de l’énergie (AIE) de mettre fin à l’expansion fossile pour limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C la base de la responsabilité dans un contexte d’urgence climatique. Cependant, le référentiel du label ISR reste pauvre en recommandations concernant la manière d’appliquer les exclusions fossiles et cela reste dans les mains des acteurs financiers de bien les appliquer - et de conserver le label, qui est volontaire. Label ISR ou pas, nous appelons les acteurs financiers à adopter des critères minimums similaires pour l’ensemble de leurs fonds ayant une prétention de durabilité - et d'étendre leurs exclusions aux entreprises qui développent des nouveaux projets d’infrastructures de transport d’énergies fossiles, comme les terminaux de GNL (non exclues par le label ISR).
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Pour autant la règlementation est impérative pour faire évoluer les pratiques ?
Tout à fait, il est important de rappeler les limites d’un label (volontaire) pour transformer la finance. Les récentes dé labellisations montrent que la finance ne se transforme pas d’elle-même, et qu'elle doit être strictement encadrée pour devenir plus durable. Aujourd'hui le manque d’action des régulateurs européens et nationaux retarde la transition du système financier. Il y a un besoin urgent de règles strictes, notamment via la révision de la SFDR au niveau européen, pour permettre cette transition.