"On ne peut pas différer la transition, on est dans une décennie critique, il faut qu'on arrive à réduire considérablement nos émissions", expliquait déjà à l'AFP en juin 2020 Elisabeth Borne, qui était alors ministre de la Transition écologique, poste où elle est restée un peu moins d'un an.
Depuis, l'Etat a été à deux reprises condamné pour non respect de ses obligations en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, donnant du grain à moudre aux pourfendeurs de "l'inaction climatique" des gouvernements d'Emmanuel Macron. Car le pays ne respecte pas ses engagements, fixés dans le cadre de l'Union européenne, pour une trajectoire de réduction de 40% d'ici à 2030 par rapport à 1990. Et ce alors même que l'UE a rehaussé ses objectifs à une réduction de 55% des émissions en 2030 et vise la neutralité carbone en 2050. La répartition nationale des efforts est en cours de négociation.
La France tente de combler son retard
Pour mettre en oeuvre ces engagements, une Stratégie nationale bas carbone (SNBC) fixe des plafonds d'émissions. Or, le premier "budget carbone" 2015-2018 a été dépassé. Et au grand dam des écolos, au lieu d'accentuer les efforts, le gouvernement a préféré remonter les seuils pour la SNBC 2019-2023, reportant de fait l'effort à accomplir.
Résultat, ces deux dernières années les émissions ont effectivement diminué "plus rapidement qu'attendu", constate le Haut Conseil pour le Climat, organe indépendant créé par Emmanuel Macron pour évaluer la politique gouvernementale. Mais le "relèvement du plafond" et l'impact du Covid-19, avec une baisse spectaculaire des émissions de 9% en 2020, "en sont les principaux facteurs explicatifs". "En raison du retard accumulé par la France, le rythme actuel de réduction annuelle devra pratiquement doubler pour atteindre au moins 3,0% dès 2021 et 3,3 % en moyenne sur la période du troisième budget carbone (2024-2028)", insistait ainsi le HCC dans son dernier rapport annuel publié en juin 2021.
Début mai, présentant ses arguments dans une des procédures judiciaires contre lui, le gouvernement assurait que les premières estimations pour 2021, malgré un rebond des émissions post-Covid, prévoyaient des émissions "encore inférieures au budget carbone indicatif" pour cette année. Et d'assurer que sa politique climatique "est à la hauteur de l'objectif actuel de réduction de 40%".
Mauvaise élève de L'Union européenne
La France ne fait pourtant pas figure de très bon élève de la classe européenne. Selon un rapport de la Commission européenne de novembre 2021, elle est très légèrement au dessus de la moyenne pour les prévisions de réalisation des objectifs à horizon 2030, accusant un retard de 6%, contre 7% pour la moyenne des 27 pays membres (comptabilisation du "partage de l'effort", qui regroupe des secteurs représentant environ 60% des émissions totales). En prenant en compte les mesures actuellement prévues, elle se classe 14e sur 27, devant l'Allemagne (20e, -16% sur ses objectifs), mais loin des résultats du Portugal, qui caracole en tête avec une prévision de dépassement de +22% des objectifs attendus.
Un déploiement insuffisant des énergies renouvelables
La France accuse par ailleurs un gros retard dans le déploiement des énergies vertes, de l'éolien (pas un seul champ offshore) au solaire en passant par la chaleur renouvelable. Elle est même le seul des Vingt-sept à avoir raté son objectif pour 2020, les renouvelables formant 19% de sa consommation d'énergie finale au lieu des 23% prévus.
La faute notamment au "fétichisme nucléaire", pointe Clément Sénéchal, chargé de campagne climat à Greenpeace France, rappelant qu'Elisabeth Borne a porté en 2019 une loi reportant de 10 ans l'objectif de réduire de 75% à 50% la part du nucléaire dans le mix énergétique français. Pour lui, "la France a décroché au niveau européen [...] en retard sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre" et est le "seul pays européen membre du G20 qui a augmenté ses subventions aux énergies fossiles".
Avec AFP.
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