Le développement de l’intelligence artificielle aura-t-il un impact sur le monde du travail ? C’est ce qu’a cherché à comprendre l’Organisation Internationale du Travail (OIT) dans un rapport publié le 23 avril dernier à l’occasion de la Journée mondiale de la santé et de la sécurité au travail.
Le rapport met en évidence l’impact positif des nouvelles technologies sur le bien-être des travailleurs, mais souligne également "la nécessité de politiques proactives pour faire face aux nouveaux risques".
"La numérisation offre d'immenses possibilités d'améliorer la sécurité sur le lieu de travail. Les robots peuvent remplacer les travailleurs dans les 'emplois dits 3D', c’est-à-dire sales, dangereux et dégradants. L'automatisation peut réduire les tâches répétitives, comme dans les chaînes de production des usines ou dans le travail administratif, ce qui permet aux travailleurs d'assumer des tâches plus stimulantes", explique dans un communiqué Manal Azzi, chef d'équipe des politiques de santé et de sécurité au travail (SST) à l'OIT. "Mais pour bénéficier pleinement de ces technologies, nous devons nous assurer qu'elles sont mises en œuvre sans encourir de nouveaux risques".
Problèmes de sécurité, surcharge cognitive, isolement social...
Parmi les principaux risques mis en lumière par le rapport : des problèmes de sécurité, des problèmes ergonomiques, des risques liés au bruit et aux vibrations ou encore des risques chimiques, liés notamment aux batteries. Mais aussi des risques psychosociaux, comme une augmentation de la cadence et de la charge de travail provoquée par l’automatisation ou une surcharge cognitive, "les travailleurs devant superviser des systèmes robotiques complexes et interagir avec eux, tout en s’assurant que leurs tâches sont alignées sur les flux de travail automatisés, ce qui altère l’équilibre entre tâches de routine et tâches avancées et augmente la tension mentale".
L’OIT souligne également le risque d’isolement social, l’automatisation allant souvent "de pair avec un recul des interactions humaines et du soutien des pairs ou de l’encadrement, laissant les travailleurs plus seuls face aux technologies et aux données". Et elle alerte enfin sur l’effacement des frontières entre vie personnelle et vie professionnelle qui "peut conduire au burnout", et sur la mise en place d’une surveillance "intrusive" et d’un "contrôle permanent", pouvant "empiéter sur la vie privée et réduire l’autonomie au travail".
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"Le management algorithmique peut sembler génial pour optimiser le travail, mais cela peut être très invasif pour les travailleurs, si ce n'est pas utilisé pour protéger la santé et la sécurité, mais pour pousser la productivité ou accélérer les deadlines", explique au média Novethic Manal Azzi. "Les travailleurs deviennent alors esclaves de ces systèmes, et ne peuvent plus exprimer leurs besoins".
Pour prévenir ces risques liés au développement des nouvelles technologies, l’OIT appelle "à un renforcement des politiques mondiales, régionales et nationales". Elle préconise également d’impliquer les travailleurs à "chaque étape de l’adoption des technologies", et de poursuivre les recherches "pour comprendre pleinement les effets à long terme de la transformation numérique sur la sécurité et la santé au travail".