Annabelle Azoulay est Chairwoman Asset & Wealth Management France chez JPMorgan
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Finance durable

Un fonds pour promouvoir la parité dans le capital-investissement

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Première étape franchie pour le fonds BPI France Spark, dédié aux enjeux de parité et d'impact sociétal. Principalement tourné vers des investisseurs institutionnels, il a une cible à 150 millions d'euros, et pourrait être d'avantage ouvert une fois mâture. Entretien avec Annabelle Azoulay, Chairwoman Asset & Wealth Management France chez JPMorgan Chase.

Vous avez annoncé un premier closing pour ce fonds. Comment cela s'est-il passé ?

Cela s'est très bien déroulé. Tous nos partenaires nous ont accompagnés en tant qu'investisseurs, LP's, pour ce premier closing. Ensemble, nous avons décidé de lancer officiellement le fonds, avec deux premiers investissements réalisés quasiment dans la foulée. Notre objectif est désormais de poursuivre les investissements cette année tout en continuant la levée de fonds. Nous nous donnons environ 12 à 18 mois pour atteindre l'objectif fixé de 150 millions d'euros. C'est un rythme soutenu, mais nous sommes satisfaits de cette étape franchie et de ces premiers investissements.

Votre stratégie consiste donc à réaliser des investissements tout en levant des fonds simultanément, avec notamment deux premiers investissements dans Revaia Growth II et Alter Equity III, des véhicules orientés impact ?

Exactement. Nous avons deux critères essentiels. Le premier est lié à la diversité : au moins 33 % de l'actionnariat des sociétés de gestion dans lesquelles nous investissons doivent être détenus par des femmes. Le second critère est celui de l'impact sociétal positif. Revaia, par exemple, est très engagé dans la deep tech, secteur à fort impact sociétal. Alter Equity, quant à lui, est pionnier en matière d'investissements à impact. Fanny Picard, à l'origine de ce fonds il y a une dizaine d'années, fut parmi les premières à intégrer ces critères d'impact dans ses investissements. Ces deux fonds correspondent parfaitement à nos critères d'investissement. Bien sûr, ces critères limitent notre champ d'action, mais ils sont essentiels pour nous et nous souhaitons continuer dans cette direction.

Dans un contexte où l'objectif est de cibler des investissements à impact, notamment liés à la parité et à l'amélioration sociétale, est-il important d'envoyer un signal fort au marché ?

Tout à fait. Nous avons clairement affiché nos ambitions avec ce fonds, notamment notre volonté d'associer impact et performance financière. Nous voulons démontrer que travailler sur l'impact peut générer une réelle rentabilité. Nous sommes convaincus qu'une équipe diversifiée en termes de profils et de points de vue est plus performante. De même, répondre à des enjeux sociétaux importants contribue à créer de la valeur économique. Ces critères ne sont pas seulement éthiques, ils sont également déterminants pour atteindre une rentabilité élevée.

C'est un enjeu important aujourd'hui de rassurer le marché sur le fait que l'impact et la performance ne s'opposent pas ?

Absolument. Malgré certaines perceptions contraires, de nombreux indicateurs prouvent que l'impact et la rentabilité vont de pair. Notre fonds souhaite précisément démontrer que cette démarche est vertueuse.

Une étude de BPI France Investissement révèle que seulement 20 % des associés dans les sociétés de gestion françaises partenaires sont des femmes, contre 44 % pour les chargées d'affaires ou analystes. Quel est votre regard sur cette question ?

Effectivement, il y a encore beaucoup de progrès à faire pour que les femmes accèdent aux postes décisionnels. Notre fonds vise justement à faire évoluer les mentalités en investissant dans des sociétés répondant à nos critères. Par exemple, lorsque nous rencontrons des fonds qui n'atteignent pas encore les 33 % d'actionnariat féminin, nous leur suggérons des pistes pour y parvenir, stimulant ainsi une réflexion et potentiellement des actions concrètes en faveur de la parité.

Concernant la performance extra-financière, la question de la méthodologie reste complexe. Comment mesurez-vous l'impact de vos investissements ?

C'est une excellente question. Actuellement, l'impact est mesuré au niveau des fonds dans lesquels nous investissons, chacun ayant ses propres critères et méthodologies. Nous préférons éviter d'imposer une approche centralisée au niveau de notre fonds afin de ne pas influencer ou contraindre inutilement les fonds dans leur travail. Cependant, nous restons attentifs et vigilants sur ce point.

Quelle est votre vision à court et moyen terme pour ce fonds, maintenant que le premier closing est réalisé ?

Notre priorité est de poursuivre les investissements avec probablement un ou deux investissements supplémentaires dans les six prochains mois. En parallèle, nous allons continuer activement la levée de fonds afin d'accroître notre capacité d'investissement. Bien entendu, les investissements seront réalisés sur la durée, mais nous avons déjà identifié quelques fonds potentiels avec lesquels nous échangeons de manière rapprochée. Nous espérons pouvoir annoncer prochainement de nouveaux investissements.