Les ultimes dispositions adoptées ont permis le vote d'une batterie de mesures destinées à renforcer l'arsenal contre les atteintes à l'environnement. Les députés ont voté la création d'un délit controversé d'"écocide", en cas de pollution intentionnelle des eaux, de l'air et des sols. La gauche juge ce délit insuffisant, comme la Convention citoyenne pour le climat (CCC) qui a inspiré le projet de loi et souhaitait aussi un "crime d'écocide" à portée internationale. La droite s'inquiète, elle, d'une "insécurité juridique". Greenpeace dénonce un "leurre" et fustige dans l'ensemble un "rendez-vous manqué du quinquennat Macron".
Avant le passage au Sénat, les députés ont également voté la création d'un ambitieux système d'évaluation des mesures de la loi et de l'impact environnemental du pays. La pandémie de Covid-19 a privé ce projet de loi de la visibilité que souhaitaient lui donner les "marcheurs", dans un calendrier parlementaire bousculé par les débats sur les restrictions sanitaires ou le maintien des régionales. En conclusion des débats, la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili a salué, visiblement émue, "une loi qui va toucher la vie quotidienne de tous nos concitoyens" et a eu "une pensée" pour les membres de la CCC. La majorité devra désormais "faire le service après-vote", avec "énormément de petites choses (qui) vont percuter le quotidien des Français", comme les mesures sur le "logement" ou le "vélo", insiste une parlementaire LREM.
Le texte a été enrichi en séance. Les députés ont élargi l'interdiction de la mise en location des "passoires thermiques" (logements classés F et G en performance énergétique) en 2028, aux logements classés E en 2034, malgré les critiques des professionnels de l'immobilier. Ils ont aussi voté un "accompagnement individualisé" des ménages à chaque étape de la rénovation, et une garantie partielle pour des prêts aux familles modestes. Insuffisant toutefois pour convaincre les écologistes, qui réclamaient comme la CCC une obligation générale de rénovation à l'horizon 2040. Absente initialement, la bicyclette a intégré le projet de loi, notamment grâce à l'élargissement de la prime à la conversion à l'acquisition de vélos électriques.
"Au milieu du gué"
Pour l'aérien, la suppression de lignes intérieures (entre Paris-Orly et Nantes, Bordeaux ou Lyon), quand il existe une alternative en train de moins de 2h30, a animé les discussions. Bien qu'elle entérine des décisions déjà prises avec Air France en contrepartie de son renflouement, la disposition a été contestée par une poignée de députés de tous bords, principalement élus du Sud-Ouest, où Airbus et ses sous-traitants irriguent l'activité. La Convention pour le climat avait préconisé une interdiction dès une alternative de 4h en train. La députée écologiste Delphine Batho dénonce un projet de loi "pas à la hauteur" des propositions de la CCC, prévenant qu'elle n'approuvera "pas un tel naufrage".
Marqué par la crise des gilets jaunes née d'une taxe carbone sur les carburants, le gouvernement n'a cessé d'insister sur la "ligne de crête" entre "ambition écologique" et "acceptabilité sociale". Une prudence manifeste au sujet des poids lourds, filière très hostile au texte. Les LREM soulignent ainsi les nombreuses "étapes" avant la mise en place éventuelle d'une écotaxe régionale dans les collectivités volontaires. Et attendent début 2022 pour préciser la trajectoire de suppression de l'avantage fiscal du gazole routier à l'horizon 2030. Pas de quoi entamer les critiques des députés LR, qui fustigent une "écologie punitive", promettant la défense d'une "écologie positive" lors de la présidentielle.
Les écologistes, à l'instar d'instances indépendantes comme le Haut Conseil pour le climat, considèrent pour leur part que ce texte ne suffira pas à atteindre l'objectif de réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990. "Ce texte est au milieu du gué", surtout pour "la jeune génération beaucoup plus impatiente", estime le "marcheur" de l'aile gauche Jean-Louis Touraine. "Ce n'est pas la première loi ni la dernière, mais on monte les escaliers quatre à quatre", répond le rapporteur Jean-René Cazeneuve (LREM).
Avec AFP.
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