Le rapport souligne que le changement climatique est “l’un des sujets les plus exposés à la désinformation”.
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Société

Climat : 128 cas de désinformation constatés dans les médias au 1er trimestre

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Trois ONG spécialisées dans le traitement médiatique des questions écologiques révèlent dans un rapport 128 cas avérés de désinformation climatique dans certains médias radio et audiovisuels sur le premier trimestre 2025. 

Alors qu’elle est souvent perçue comme l’apanage des réseaux sociaux, la désinformation sur les enjeux écologiques est également présente dans les médias traditionnels. 

QuotaClimat, Data for Good et Science Feedback, 3 ONG spécialisées dans le traitement médiatique des sujets environnementaux et climatiques, ont dévoilé ce jeudi 10 avril les premiers résultats de leur analyse de la désinformation sur ces sujets dans les médias traditionnels. 

Le rapport se penche sur une vingtaine de médias radio et TV, la presse écrite ne pouvant être examinée par l’intelligence artificielle, utilisée pour analyser les milliers d’heures d’antenne. Les séquences retenues sont ensuite vérifiées par des fact-checkers des associations. 

Sud Radio bat des records de désinformation 

Sur les 128 cas de désinformation avérés entre le 1er janvier et le 31 mars 2025, Sud Radio est le média le plus concerné, avec 40 cas au compteur. Un chiffre d’autant plus alarmant que la chaîne ne consacre que 37h par semaine à du contenu "informatif".  

Patrick Roger, directeur de la chaîne, s’est justifié auprès du Monde en expliquant "donner la parole à tout le monde, que ce soit sur l’A69 ou les ZFE, y compris des personnes qui peuvent être critiques, mais ce sont des arguments et non de la désinformation".

Vient ensuite la chaîne d’information en continu CNews, propriété du milliardaire conservateur Vincent Bolloré, avec 26 cas de désinformation. Elle avait déjà écopé durant l’été 2024 d’une amende de 20 000 euros de la part de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom). En août 2023, un invité qui avait nié l’existence d’un lien entre le réchauffement climatique et les activités humaines n’avait pas été repris. 

D’autres médias, dont certains appartenant au service public, affichent une dizaine de cas. Il s’agit de LCI, RMC, BFMTV, Europe 1 et Franceinfo TV. 

Des médias jugés fiables

Le rapport met en évidence que si les Français ont conscience de leur exposition quotidienne à la désinformation, ils ne s’attendent pas forcément à ce qu’elle vienne de ces médias. "69 % des Français font confiance aux journaux télévisés d’information pour les informer, contre 29 % pour les réseaux sociaux."

Il note également que le changement climatique est "l’un des sujets les plus exposés à la désinformation", "plus que (celle) liée à l’Ukraine, aux questions LGBTQ+ ou même au conflit régional au Moyen-Orient". Ces cas de désinformation ont par ailleurs principalement lieu "à proximité des grands moments politiques et géopolitiques", comme l'investiture de Donald Trump, le 20 janvier dernier.

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Les sujets les plus touchés au premier trimestre 2025 étaient ceux de l’énergie (50 %), en particulier à propos des énergies renouvelables, et de la mobilité (45 %), notamment sur les véhicules électriques. "Un constat particulièrement inquiétant compte tenu du consensus scientifique autour de la nécessité et l’urgence de décarboner notre mix énergétique d’une part et d’électrifier notre parc automobile d’autre part", souligne le rapport. 

Un manque de contextualisation 

Plusieurs solutions sont par ailleurs proposées par les 3 ONG. Elles mettent notamment en avant que de nombreux cas de désinformation relevaient de l’absence de réaction des journalistes à l’antenne face aux propos fallacieux tenus par des invités. Elles invitent donc les rédactions à accentuer leur travail de "debunking" et de "réinformation", tout en appelant à un meilleur "rôle des journalistes dans la re-contextualisation des paroles rapportées". 

Elles constatent également la "faible couverture des sujets environnementaux", qui ne représentent en moyenne que 2 % du temps d’antenne, "avec une variance allant de 0,9 % pour CNews à 6 % pour RFI".

Le rapport suggère d’accentuer cette couverture, en soulignant "que la fréquence d’exposition à des informations permet d’ancrer un message", accentuant "la vulnérabilité de la population aux campagnes de désinformation climatique". 

Enfin, le texte rapporte aussi 373 cas qui "dépassent le cadre de l’inaction" et qui relèvent plutôt de "discours sur l’inaction", visant notamment à décrédibiliser les solutions de la transition écologique et les porteurs de ces messages ("scientifiques, institutions spécialisées, défenseurs de l’environnement, journalistes environnementaux").