La France compte 8 000 km de digues pour protéger ses littoraux.
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Climat

Comment la France se prépare-t-elle à la montée des eaux ?

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Conséquence du réchauffement climatique, l'augmentation du niveau des océans est inéluctable. Comme tous les pays possédant des littoraux, la France doit mettre en place des solutions de protection de ses côtes. Décryptage.  

Avec ses 20 000 km de littoral, dont 14 500 en Outre-mer, la France est particulièrement exposée à l'élévation du niveau de la mer. Ce phénomène, aujourd’hui inévitable, est dû au réchauffement climatique. La hausse de la température des océans entraîne une augmentation du volume de l’eau, un mécanisme appelé dilatation thermique. À cela s’ajoute la fonte, de plus en plus rapide, des glaciers

D’après le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), le niveau de la mer va continuer d’augmenter pendant plusieurs siècles. D’ici 2100, il estime qu’il atteindra 30 à 60 cm supplémentaires dans un scénario optimiste et jusqu'à 60 à 110 cm supplémentaires, d'après le ministère de la Transition écologique.

En France, ce sont 1,5 million de personnes qui sont exposées au risque de submersion marine. Les territoires les plus à risque sont la Charente-Maritime, le Nord, la Seine-Maritime, la Côte d’Azur, le Pays basque, la Corse et les Outre-mer. 

Des constructions humaines  

Plusieurs types de solutions sont déployés sur le territoire pour tenter de remédier à cette menace, en particulier depuis les ravages de la tempête Xynthia, qui a fait 52 victimes en 2010. La technique la plus courante et la plus ancienne est la construction d’ouvrages dans le but de repousser la mer. 

La France compte plus de 8 000 km de digues, qui permettent de faire obstacle à la houle et ainsi protéger les habitations proches de la plage. Ces ouvrages, parfois anciens, sont toutefois de moins en moins sécurisants à mesure que le niveau de la mer augmente. Ils nécessitent donc régulièrement des travaux d’entretien et de rehaussement. 

Ces réaménagements ont des coûts très élevés pour les communes, qui sont rarement capables de les financer elles-mêmes. A Bouin, en Vendée, la rénovation de seulement 4 km de digue a coûté quasiment 8 millions d’euros d’argent public. Une digue en mauvais état représente toutefois un danger important. En effet, en cas de rupture, même sur quelques mètres, elle peut inonder de grandes surfaces en quelques minutes. 

D’autres ouvrages que les digues sont également créés. Les enrochements sont des amas de blocs de pierre qui fonctionnent de la même façon que les digues pour repousser les vagues. Les épis, eux, sont construits perpendiculairement à la mer. Ils forment des tourbillons au contact des courants marins et retiennent ainsi le sable. Enfin, les portes à flot se trouvent dans les fleuves qui subissent la fluctuation des marées. Elles permettent d’évacuer les eaux de surface tout en évitant la pénétration de l’eau de mer. 

Des solutions naturelles 

Une alternative à ces constructions humaines est le renforcement de la protection offerte par la nature. La technique la plus courante est l’installation de ganivelles sur le bord de mer. Ces barrières faites de piques en bois de châtaigner délimitent les espaces ouverts au public afin d’éviter que les plages ne soient abîmées par le piétinement humain. Elles permettent ainsi à la végétation de reprendre ses droits. Cette dernière retenant le sable grâce à ses racines, celui-ci sert de digue naturelle.

Les sédiments des littoraux s’avèrent être d’excellents alliés face à la montée des eaux. En prendre soin est donc primordial. Sur les plages de galets, des campagnes de sensibilisation des touristes sont mises en place afin d’éviter qu’ils ne les emmènent avec eux. 

L’entretien des dunes littorales est confié à l’Office national des forêts (ONF). En plus de la végétalisation, elle installe aussi des brise-vents, afin d’éviter que des bourrasques n’emportent le sable. Le modelage fait en sorte que la dune prenne la forme la plus optimale pour sa conservation. 

Rendre des terres à la mer 

Une solution qui a porté ses fruits, notamment en Angleterre et aux Pays-Bas, est la "dépoldérisation", c’est-à-dire l'abandon de certaines terres à la mer. Aussi appelée "repli stratégique", cette technique permettrait de mieux protéger les territoires alentours. Il faut avoir en tête que les littoraux étaient auparavant des environnements changeants et dynamiques, peu à peu domptés par les activités humaines

Depuis 2017, le projet Adapto observe et analyse la mise en œuvre et les conséquences d’une telle politique sur 10 sites français. Dans la plupart de ces lieux, les digues ont été ouvertes ou n’ont pas été reconstruites après avoir été ébréchées.

10 sites français, dont 9 en métropole et 1 en Guyane, sont en expérimentation.
©adapto

En reculant les activités humaines, un espace naturel partagé entre terre et mer est créé. La mer peut alors y délivrer son énergie lors des hautes marées ou des tempêtes et les vagues se brisent avec moins de force sur les digues installées à l’arrière. Leur mouvement a même la capacité de ramener des sédiments dans ces espaces "dépoldarisés" qui vont petit à petit s’élever, créant une barrière naturelle.